Pourquoi les investisseurs achètent des obligations à taux négatif ?

07/07/2021
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Par Romain d'Agnano, le 7 septembre 2019

Revenons aux fondamentaux : une obligation est un titre de créance, c’est à dire un prêt contracté par une entité, Etat ou entreprise, afin se financer sur le marché. Le taux d’intérêt, en principe positif, correspond à la rémunération du prêteur, en contrepartie du capital accordé à l’emprunteur sur la durée et selon les modalités de remboursement convenues. En principe, prêter vous rapporte, et emprunter vous coûte…

Pourquoi les taux d’emprunt de certains Etats deviennent-ils négatifs ?

Les banques centrales déterminent un taux d’intérêt directeur. En Europe, il s’agit de la banque centrale européenne (BCE). Dans sa zone monétaire, le taux d’intérêt directeur détermine les taux auxquels seront rémunérés les dépôts des autres banques et établissements financiers, le taux de refinancement et le taux d'escompte. Le taux directeur influence directement le prix du crédit et de l'épargne octroyés par les banques privées qui répercutent les taux de la banque centrale. Cette politique, combinée à des anticipations d’inflation de plus en plus faibles, se traduit par l’apparition de taux d’intérêt négatifs sur une partie des titres obligataires émis par les Etats de la zone euro, ceux réputés es plus solides, comme l’Allemagne et la France. Au moment où j’écris cet article, l’obligation allemande à 10 ans est à un taux de -0,6%, l’OAT 10 ans française à -0,3%.

Dès lors, quel intérêt de se porter acquéreur de tels titres ?

De nombreuses personnes se posent cette question, à première vue légitime. Pourquoi devrais-je prêter de l’argent pour que, in fine, on me rembourse moins que le capital investi. Cette hypothèse est a priori antinomique par rapport à l’objectif premier d’un acteur économique rationnel qui est d’accord pour prêter contre une rentabilité en contrepartie.

En fait, 3 raisons principales expliquent que ces papiers soient non seulement souscrits, mais aussi très recherchés.

  • la politique et les ratios prudentiels : la réglementation du secteur financier contraint les banques et les assureurs à respecter des ratios de solvabilité, et ces acteurs doivent acheter ces obligations de « bonne qualité », de façon à ce que la part de ces titres dans leurs actifs soit suffisamment élevée pour que le risque global de l’établissement financier soit jugé acceptable. L’investissement des banques sur ces titres participe à la faiblesse des taux en accentuant la demande, et payent le prix de la garantie…
  • Une anticipation de la poursuite de la baisse des rendements obligataires, ce qui aurait pour effet, paradoxalement, de valoriser la valeur de ces titres alors même qu’ils sont à ce jour en rendement négatif, puisque la baisse des taux a pour conséquence d’augmenter la valeur du titre obligataire…
  • Une anticipation de l’appréciation de l’euro contre leur monnaie nationale pour le cas des investisseurs étrangers à la zone euro.

Il convient néanmoins de relativiser cette situation. Sur les emprunts d’entreprise on peut trouver encore des rémunérations positives et cette situation ne signifie pas que c’est la fin du monde du rendement : il y a des solutions à trouver pour obtenir une rémunération de ses actifs financiers. Nous vous accompagnerons avec plaisir dans cette quête !